Critique cinéma : Le Garçon et la Bête
Sixième film du réalisateur japonais Mamoru Hosoda, à qui l’on doit notamment Les Enfants loups et La Traversée du temps, Le Garçon et la bête est une œuvre qui a des chances de faire date dans le cinéma d’animation nippon.
Petit point scénaristique : il existe deux mondes, celui des humains, et celui des bêtes appelé Jutengai. On y suit les pérégrinations d’un jeune garçon solitaire, Ren, qui s’est enfui de chez lui après la mort de sa mère. Le destin le laisse entre les mains d’une bête tout aussi seule, Kumatetsu, qui décide d’en faire son disciple sabreur et le rebaptise Kyuta.
Ce qui frappe en premier lieu est la différence culturelle entre les deux mondes : celui des humains est contemporain, alors que celui des bêtes est traditionnel et fait référence à un Japon féodal empreint de magie. L’histoire fait mention d’une dualité qui règne dans le cœur des humains entre les ténèbres et la lumière. Les bêtes, préservées de ce mal, tiennent à rester à l’écart au sein de Jutengai, leur monde. Ils peuvent ainsi perpétuer leurs traditions et apprendre à maîtriser leurs pouvoirs pour faire le bien.
Cependant le véritable intérêt du film se trouve être l’étonnante relation entre le maître et son apprenti, tous deux brutes de décoffrage lorsqu’il s’agit d’échanger. Et c’est bien là que réside tout le sel du film, car Le Garçon et la bête raconte la difficile harmonie entre deux âmes solitaires et incontrôlables. Le film évite heureusement l’écueil de la facilité en plaçant immédiatement le maître Kumatetsu comme une personne invivable, égoïste et sans pitié. Mais le jeune garçon a lui aussi sa part de noirceur, ce qui provoque l’affrontement verbal constant des deux protagonistes du film. Pourtant les deux êtres auront chacun à apprendre l’un de l’autre, et les rôles parfois inversés, accentueront la justesse des dialogues.
L’un des grands thèmes du film c’est la solitude et le besoin d’avoir ses maîtres pour avancer. Le Garçon et la bête est avant tout une aventure humaine où chacun apprend à sa manière. C’est montré avec beaucoup d’efficacité lorsque nos héros parcourent le monde des bêtes pour y rencontrer les maîtres les plus anciens et aux pouvoirs les plus impressionnants. Chacun interprète à sa manière ce qu’ils enseignent à nos héros. En somme, le film de Mamoru Hosoda est une vraie ode à l’apprentissage, et met en valeur tout ce qu’autrui peut nous apprendre, quelque soit la manière dont il le fait.
C’est également une réussite visuelle de tous les instants, l‘introduction enflammée en atteste. Les dessins allient le traditionalisme et le simplisme japonais à des décors dynamiques plus colorés. Le tout donne au film un cachet très original tout en respectant l’héritage laissé par des dessinateurs tel que Hayao Miyazaki.
Pour conclure, on ne peut que conseiller ce petit bijou d’émerveillement qu’est Le Garçon et la bête, tant par sa profondeur et son esthétisme, que pour ses personnages attachants. On pourra toujours lui reprocher une seconde partie dans le monde humain un peu plus lente, ou le fait que le film, en apparence tout public, pourrait ne pas être accessible aux plus jeunes. Ce serait cependant les seuls petits écueils à adresser à un film aussi magique. Humour, émotion, action et vraie maîtrise du sujet sont au rendez-vous de ce joyau aux allures de conte qu’on ne peut que vous recommander.