Les raisons de la condamnation de Google à payer 50 millions d’euros à la CNIL
Fini de se moquer de la vie privée des utilisateurs, la CNIL sanctionne. Ce 21 janvier 2019, pour l’anniversaire de la décapitation de Louis XVI, la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés a tranché. Nous ne parlons ici pas de tête bien entendu, si ce n’est celle d’Internet.
À la suite des nombreuses plaintes déposées à l’encontre de Google, la formation restreinte a mené son enquête. Bilan : 50 millions à payer.
On ne joue plus sur les mots
Cela fait bien longtemps que les grandes entreprises américaines, et plus particulièrement les GAFAM (Google Apple Facebook Amazon et Microsoft), se baladent à la limite de la légalité. Très peu inquiétées ces dernières années, elles font maintenant l’objet d’un plus grand intérêt de la part de l’Union Européenne. Google a trop longtemps profité de notre crédulité et de notre innocence en cachant les informations et en utilisant nos données à notre insu. Il ne suffit maintenant plus uniquement de prévenir le consommateur, mais bien de l’avertir explicitement, dans une forme simple et directe.
Il n’est désormais plus autorisé d’obliger l’utilisateur à accepter les conditions en bloque. Elles doivent être séparées et acceptées individuellement.
Il doit être fait mention de façon claire de l’utilisation qu’il sera faite de ces dernières et de quels intervenants y auront accès.
Interdiction de pré-cocher les cases et d’ainsi essayer de profiter de l’inattention de l’utilisateur. Il devra lui-même les cocher selon sa volonté.
De ce fait, la formation restreinte punit le manque de transparence et de base légale quant au consentement des usagers.
Ne vous réjouissez pas trop vite…
À vrai dire, cela s’est joué à peu de choses. Si la CNIL a été jugée compétente pour accuser Google, c’est parce que ce dernier ne possède pas de « guichet direct ».
Un « guichet direct »
Il s’agit d’un mécanisme instauré par l’UE disant que si la société dispose d’un établissement principal dans un pays européen, alors cet établissement aura pour seul interlocuteur l’autorité de ce pays. En d’autres termes, si l’entreprise possède son siège social dans un pays de l’UE, seul ce pays est compétent pour la juger.
Quel rapport avec Google ?
Eh bien Google fait partie des entreprises installées en Irlande (comme Microsoft, Apple, Dell…). Cela lui permet donc d’être sous la législation irlandaise. Elle profite ainsi en autres d’un régime de faveur en termes de taxation. Il aurait donc dû être jugé par la justice irlandaise et non la CNIL qui est française, non ?
« Malheureusement », au moment du début des poursuites (juin 2018), il ne s’agissait pas de l’établissement principal. Il ne disposait en effet pas d’un pourvoir de décision sur les téléphones sous Android ni sur la création des comptes. Ce sûr quoi étaient axées les plaintes.
Il y a donc fort à parier que Google a d’ores et déjà réglé ce problème. Ainsi, à l’avenir, la CNIL ne pourra pas juger du sort de Google qui appartiendra à la justice irlandaise. Notons que cette dernière n’a pas l’habitude d’aller à l’encontre des entreprises qu’elle héberge.
Un geste fort ?
Après toutes ces discutions autour des réglementations sur la vie privée, il est bon de constater que tout cela n’a pas servi à rien. C’est en effet sur le fameux RGPD (Règlement général sur la Protection des données), applicable depuis mai 2018, que se basent les différentes plaintes.
Cependant, bien que les choses bougent enfin, cela reste un peu léger. Nous parlons ici de l’entièreté des utilisateurs européens d’Android qui sont lésés. Ceux-ci ont été mal informés et dupés. Quand on sait que la société fait 110 milliards de chiffre d’affaires annuel (2018), il semblerait que 50 millions ce ne soit pas grand-chose en fin de compte. À noter qu’il s’agit d’un montant record et du maximum imposable.
Le côté positif est que nombreuses sont les entreprises qui doivent paniquer à l’heure actuelle. Elles vont d’ailleurs sûrement s’empresser de se mettre aux normes. Il y a très peu de chances que la CNIL s’arrête là, d’autres têtes risquent fort de tomber.