5 raisons (ou pas) de jouer à South of Midnight
South of Midnight n’est pas simplement le nouveau jeu de Compulsion Games, c’est aussi le premier projet du studio depuis son rachat par Microsoft. Attendu de longue date, il arrive avec une promesse claire : raconter un mythe sudiste, ancré dans un folklore rarement exploré dans le jeu vidéo. Pas de monde ouvert générique, pas de recyclage médiéval ou cyberpunk, mais un bayou habité de fantômes, de douleurs enfouies et de légendes locales.
Le titre se présente comme un jeu d’action-aventure à la troisième personne, mêlant exploration narrative et affrontements. L’univers visuel fait le choix d’un style texturé et artisanal en stop-motion. Il mise tout sur l’ambiance, la musique, et une identité visuelle forte. Le tout repose sur une héroïne, Hazel Flood, au cœur d’un récit surnaturel où les émotions prennent forme. Mais derrière son esthétique affirmée, la proposition tient-elle la route ? Voici 5 raisons de jouer ou pas à South of Midnight, pour savoir si le voyage mérite votre attention.
Raison 1 (Pour) : une direction artistique qui donne une vraie âme au jeu
South of Midnight séduit dès ses premières images. Contrairement aux tendances actuelles du photoréalisme ou des univers lisses et interchangeables, le jeu opte pour une direction artistique marquée, presque artisanale. Chaque texture semble peinte à la main, chaque élément du décor affiche une patine singulière. Les environnements évoquent des lieux réels, mais filtrés par la mémoire et le mythe. Ce choix visuel sert parfaitement le propos du jeu, qui s’ancre dans un sud des États-Unis déformé par les traumatismes et les légendes.
La lumière joue un rôle central. Au fil de la journée, les marais changent de ton, les cabanes fatiguées prennent des teintes dorées ou brumeuses, et chaque zone possède sa propre palette émotionnelle. Le rendu stop-motion des animations, bien que clivant, renforce cette impression de monde animé par des souvenirs. Les mouvements saccadés participent à l’atmosphère irréelle du jeu.
Les créatures rencontrées, appelées Haints, impressionnent par leur design symbolique. Chacune représente une souffrance précise. Le joueur ne combat pas des monstres, il affronte des métaphores. Hazel elle-même, l’héroïne, échappe aux clichés. Son apparence brute, réaliste, l’ancre dans le décor avec justesse. Rien n’est laissé au hasard : la cohérence visuelle donne au jeu son pouvoir d’attraction le plus durable.
Raison 2 (Contre) : un gameplay sans surprise et surtout répètitif
Derrière sa patte artistique affirmée, South of Midnight propose un gameplay qui manque de souffle. L’action se répète selon un schéma rigide. Hazel explore une zone fermée, active quelques dialogues, affronte une poignée d’ennemis, puis passe à la suivante. Ce cycle, présent dès le premier chapitre, ne se renouvelle jamais vraiment. Très vite, le joueur anticipe ce qui l’attend, et l’ennui s’installe.
Les pouvoirs de tissage permettent d’attirer, repousser ou figer les ennemis. Ces compétences sont utiles, mais leur usage reste limité. Aucun système de combo ne vient enrichir les affrontements, et la lenteur des animations empêche toute montée en intensité. De plus, les arènes de combat sont toutes construites sur le même modèle : peu d’espace, peu d’ennemis, et très peu de challenge.
L’évolution du personnage est elle aussi minimaliste. L’arbre de compétences propose uniquement des améliorations passives. Aucun pouvoir ne change en profondeur. Le joueur ne peut pas adapter sa stratégie ou développer un style personnel. Tout est prévu à l’avance, sans surprise. Ainsi, même si l’ambiance du jeu reste forte, l’interactivité est plate.
Raison 3 (Contre) : une absence de difficulté
South of Midnight choisit d’être accessible, mais pousse cette volonté trop loin. À aucun moment, le joueur ne se sent mis à l’épreuve. Les ennemis sont peu agressifs, les boss tombent rapidement, et les affrontements ne demandent aucune adaptation. Dès les premiers combats, les mécaniques sont comprises, et rien ne vient bousculer cette routine. Le jeu devient alors un enchaînement de scènes sans tension. Les checkpoints sont fréquents, les soins abondants, et les pertes presque inexistantes. Le joueur traverse le jeu, mais sans passion. Il observe plus qu’il ne participe.
Ce manque de résistance impacte directement la narration. Les scènes censées être marquantes perdent en impact quand elles ne sont précédées d’aucun effort. Il ne suffit pas de construire un univers riche. Il faut aussi créer un lien émotionnel, souvent forgé dans la difficulté. Ici, l’implication reste superficielle, car rien ne pousse à se dépasser.
Raison 4 (Contre) : une écriture paresseuse
South of Midnight veut traiter de sujets profonds : la douleur, la mémoire, les liens familiaux brisés. Pourtant, son écriture ne laisse jamais de place à l’interprétation. Les dialogues explicitent chaque émotion, chaque métaphore, chaque enjeu. Le joueur n’est jamais invité à comprendre par lui-même. Tout est dit, parfois répété, au risque d’écraser la subtilité du propos.
Les personnages secondaires manquent de nuance. Leurs motivations sont souvent stéréotypées, leurs interventions prévisibles. Même Catfish, le narrateur au ton ironique, finit par devenir mécanique. Ce qui pouvait apparaître comme un charme devient un tic. À force de tout verbaliser, le jeu prive le joueur de toute découverte émotionnelle.
Le scénario principal, quant à lui, suit une ligne trop claire. Le grand antagoniste se devine très tôt, les retournements sont rares, et les arcs narratifs secondaires sont survolés. Si il est parfois touchant, il n’est jamais poignant.
Raison 5 (Contre) : une progression linéaire
Malgré ses décors ouverts en apparence, South of Midnight ne propose aucune liberté réelle. Chaque zone suit un couloir déguisé, chaque interaction est scriptée, chaque découverte prévue. Le joueur ne choisit ni son rythme, ni son parcours. Il suit un fil invisible qui l’emmène d’un point à un autre sans jamais bifurquer. Cette linéarité tue rapidement l’illusion d’un monde vivant.
En refusant de laisser de la place au joueur, South of Midnight transforme son univers riche en décor figé. Le joueur admire, mais ne construit rien. Il n’échoue jamais, ne découvre rien par lui-même, et ne peut s’approprier aucune partie de l’expérience. Le monde est beau, certes, mais il reste fermé, comme une exposition interdite au toucher.
South of Midnight
Résumé
South of Midnight est un jeu admirable sur la forme, mais limité sur le fond. Son univers graphique et sonore marque les esprits, mais son gameplay répétitif, son écriture trop dirigiste et son absence totale de défi en font une expérience belle, mais creuse. Le voyage est court, la mémoire floue, le potentiel mal exploité.
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Graphismes - 9/10
9/10
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Jouabilité - 5/10
5/10
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Bande-son - 8/10
8/10
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Durée de vie - 8/10
8/10
Globalement
Pour
Direction artistique unique
Ambiance sonore immersive
Créatures inspirées
Univers rare et bien documenté
Contre
Gameplay trop répétitif
Aucune difficulté réelle
Narration trop explicative
Écriture trop dirigiste
Exploration absente
Pas de progression libre